01 Sep Protection des Lanceurs d’alerte : les nouvelles obligations employeurs
Dans le monde de l’entreprise, un lanceur d’alerte est un salarié qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un risque grave pour la santé publique ou l’environnement au sein de l’entreprise. Le salarié qui respecte la procédure de signalement bénéficie d’une protection contre toute sanction, licenciement ou discrimination.
Le statut du lanceur d’alerte a été crée par la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 (loi dite « Sapin 2 ») relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. L’objectif principal du lanceur d’alerte est donc d’attirer l’attention sur les manquements, les activités illégales ou les menaces contraires à l’éthique. La loi Waserman promulguée le 21 mars 2022 est venue tout à la fois :
- Élargir les faits pouvant faire l’objet d’une alerte : alors que le lanceur d’alerte devait avoir eu personnellement connaissance des faits dénoncés, la loi prévoit désormais que dans le contexte professionnel, le lanceur d’alerte peut signaler des faits rapportés par un tiers.
- Renforcer la protection du lanceur d’alerte : en imposant aux employeurs de prendre de nouvelles mesures en la matière.
Quelles sont ces nouvelles mesures permettant de renforcer la protection du lanceur d’alerte ?
Modification du règlement intérieur de l’entreprise
Au 1er septembre 2022, le règlement intérieur devra être modifié puisqu’il sera dorénavant nécessaire d’y rappeler l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alerte posé au chapitre II de la loi « Sapin 2 ». Ce dispositif vise ainsi à protéger contre des mesures défavorables injustifiées tout salarié qui révèlerait ou signalerait de manière désintéressée et de bonne foi des faits dont il a eu connaissance et qui sont constitutifs de certaines violations de la règlementation applicable et notamment d’un crime ou d’un délit.
Par ailleurs, les articles du Code du travail relatifs aux harcèlement sexuel et moral devront être également mis à jour au sein du règlement intérieur. En effet, les articles L 1152-2, L 1153-2 et L 1153-4 du Code du travail ont été réécrits afin d’y inclure la protection renforcée du lanceur d’alerte. Il convient de respecter scrupuleusement la procédure afférente à la modification du règlement intérieur. En effet, pour qu’un règlement intérieur puisse être rendue opposable aux salariés, la modification du règlement intérieur passe nécessairement par : la consultation du CSE (s’il existe dans l’entreprise), puis par la transmission à l’inspection du travail qui en contrôle la légalité. Enfin, il doit être déposé au greffe du Conseil de Prud’hommes et porté à la connaissance des salariés par affichage ou par tout autre moyen.
Liste des mesures de représailles prohibées
Si l’article L 1121-1 du Code du travail rappelle déjà que le salarié lanceur d’alerte bénéficie d’une protection générale contre le licenciement, contre toute sanction disciplinaire, et contre toute mesure discriminatoire, la loi Waserman, est venue insérer dans cet article une liste précise des formes de représailles prohibées telles que :
- Suspension, mise à pied, licenciement ou mesures équivalentes.
- Rétrogradation ou refus de promotion.
- Transfert de fonctions, changement de lieu de travail, réduction de salaire, modification des horaires de travail.
- suspension de formation.
Intégration de la protection du lanceur d’alerte dans les affichages obligatoires
L’article L 1142-6 du Code du travail oblige l’employeur à publier l’article 225-1 du Code pénal prohibant les discriminations dont le salarié peut être victime. Cet article intègre désormais l’interdiction de prendre une mesure discriminatoire à l’encontre d’un salarié en raison de « sa qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte ». A compter du 1er septembre 2022, les affichages obligatoires devront contenir ces références.
Établissement d’une procédure interne de recueil des signalements des alertes
La loi Waserman, permet au lanceur d’alerte de choisir entre le signalement interne (au sein de l’entreprise) ou externe (auprès de l’autorité compétente, du Défenseur des droits, de l’autorité judiciaire ou d’un organe européen). Cette nouveauté met ainsi fin à la hiérarchie actuelle des canaux de signalement (signalement interne puis externe avant divulgation publique de l’information en dernier recours).
Cette loi impose également aux entreprises d’au moins 50 salariés de mettre en place une procédure interne de recueil et de traitement des alertes. Celle-ci comprend une consultation du CSE avant que la procédure soit mise en œuvre. Pour les entreprises de moins de 250 salariés, cette procédure pourra être commune à plusieurs autres entreprises ou à plusieurs sociétés d’un même groupe. Un décret d’application de la loi du 21 mars 2023 est attendu sur ce point et devrait voir le jour dans le courant du mois de septembre.
Sanctions pour l’employeur
En cas de rupture du contrat de travail consécutive au signalement d’une alerte, le salarié peut saisir le conseil de prud’hommes. Toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions susvisées est frappée de nullité, et celles comprises les sanctions disciplinaires telles que les licenciements.
Le conseil de prud’hommes peut obliger l’employeur, en plus de toute autre sanction, à abonder le compte personnel de formation (CPF) du lanceur d’alerte jusqu’au plafond majoré applicable au salarié peu qualifié (soit jusqu’à 8 000 €, au lieu de 5 000 € pour les autres salariés). Cette décision peut être prononcée à l’occasion de tout litige porté devant le conseil de prud’hommes, et pas seulement en référé. N’hésitez pas à vous rapprocher d’un cabinet d’avocats spécialisés en droit social pour vous accompagner dans la mise à jour de vos documents et vous conseillez sur la conduite à tenir.